(Article mis en ligne le 05.08.2025)
Nous sommes nombreux à être importunés par des appels téléphoniques intempestifs visant à nous démarcher dans le but de nous vendre produits et autres services. Une loi votée dernièrement par le Parlement devrait permettre de faire enfin évoluer les choses, avec l'intégration de la notion de consentement inversant la logique actuelle. On vous explique.
De quoi parle t'on ?
En France, le démarchage téléphonique est défini dans l'article L221-16 du code de la consommation [à consulter ici]. Outre la protection des données personnelles RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), la pratique est encadrée par les lois du 17 mars 2014 [à consulter ici] et du 24 juillet 2020 [à consulter ici] visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux.
Ces textes sont venus renforcer l'opposition à posteriori du consommateur à être démarché, reposant sur 3 catégories de règles :
- Celles relatives aux consommateurs (inscription gratuite sur la liste "Bloctel" pour s'opposer au démarchage, interdiction du démarchage dans certains secteurs : rénovation énergétique, Compte Personnel de Formation…)
- Celles relatives aux horaires et fréquences d'appel
- Celles relatives au contenu des appels
Cependant, ces lois n'étaient pas suffisantes, certains acteurs peu scrupuleux allant jusqu'à ignorer les interdictions sectorielles ; par exemple, nombre de ces appels intempestifs concerne encore les travaux de rénovation énergétique alors même que c'est interdit. Par ailleurs, seuls 9% des consommateurs sont inscrits sur le dispositif "Bloctel", et ce dernier ne protège pas les personnes contre les appels intempestifs.
Alors qu'est ce qui va changer ?
Une Proposition de loi visant à lutter "contre toutes les fraudes aux aides publiques" a été déposée par le député du Groupe "Ensemble pour la République - EPR" Thomas CAZENAVE, co-signée notamment par Christine LE NABOUR.
Votée en mai dernier par le Parlement (le 14 mai par l'Assemblée nationale ; le 21 mai par le Sénat), elle comprend un volet sur le démarchage commercial par téléphone ou voie électronique. Elle a été promulguée par le président de la République le 30 juin dernier.
Le texte adopté prévoit notamment une interdiction de principe du démarchage téléphonique dans tous les secteurs d’ici un an (août 2026). Ces 13 mois doivent permettre aux professionnels de revoir leurs méthodes de prospection téléphonique et mettre en place les outils nécessaires au recueil du consentement. En effet, le démarchage direct (ou par l’intermédiaire d’un tiers) par téléphone auprès d’un particulier, sera désormais interdit si l’entreprise n’a pas obtenu au préalable son consentement (ce dernier étant défini comme une « volonté libre, spécifique, éclairée, univoque et révocable »). Ainsi, il faudra que le particulier ait donné son accord explicite, que ce soit lors d’un achat, lors d’une visite en magasin ou via un formulaire, avec une preuve de ce consentement qui devra pouvoir être apportée par le professionnel.
- À noter : le texte continue d’autoriser le démarchage par téléphone si le particulier est prospecté dans le cadre d’un contrat auquel il a souscrit (et ce, même si la prospection porte sur des produits/services complémentaires à ce contrat qui auraient pour objectif d’ « améliorer ses performances ou sa qualité »). Si le particulier s’oppose à la poursuite d’une communication, le professionnel devra cependant mettre fin à l’appel sans délai et s'abstenir de le contacter à nouveau.
Et ce n'est pas tout...
Comme évoqué plus haut, le démarchage téléphonique est déjà interdit pour des secteurs tels que la rénovation énergétique ; pour autant, de nombreux abus sont encore constatés. C’est pourquoi la loi du 30 juin 2025 renforce également les sanctions pécuniaires ainsi que les pouvoirs d’enquête et de sanctions de la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) ; les services peuvent communiquer sur les entreprises qui ont enfreint la loi ainsi que sur les sanctions prononcées.
Deux exemples sur ce mois de juillet 2025 :
- le 07.07.2025 : Suite à 18 signalements dont une dizaine sur la plateforme "SignalConso", l’entreprise "Tech ENR" a été sanctionnée à hauteur de 260 900 € pour avoir contacté plus de 5 000 personnes inscrites sur la liste "Bloctel" [publication ici]
- le 17.07.2025 : l’entreprise "Énergie B" a été condamnée à 253 275 € d’amende pour 3 377 démarchages jugés illégaux car en violation de l’interdiction sectorielle [publication ici]
Des sanctions relayées par la DGCCRF, notamment sur ses réseaux sociaux (illustration ci-dessus)
Consultez la Loi du 30 juin 2025
Chacun peut contribuer à améliorer la situation.
Comme le montrent ces condamnations de la DGCCRF, chacun peut contribuer à améliorer la situation en se saisissant des moyens mis à disposition du consommateur par les pouvoirs publics :
- "Bloctel" permet de s'inscrire gratuitement sur une liste d'opposition au démarchage téléphonique. Les entreprises sont tenues de consulter cette liste et de ne pas contacter les numéros inscrits. Si le dispositif a montré certaines limites, il permet néanmoins de notifier votre refus et réduire le nombre des appels (dans l'attente de l'interdiction généralisée sans consentement) [accessible ici]
- "Signal Conso" permet de signaler les entreprises qui ne respectent pas les règles de démarchage, notamment celles qui appellent en dehors des horaires autorisés ou qui ne respectent pas l'inscription sur "Bloctel". Les signalements sont traités directement par la DGCCRF, et peuvent donner lieu à des sanctions (exemple avec la décision du 7 juillet dernier exposée plus haut) [accessible ici]
- Le numéro de téléphone 33700 est dédié au signalement des spams vocaux et SMS. Lorsque vous recevez un message ou un appel suspect, vous pouvez le transférer au 33700 ; les opérateurs télécoms utilisent ces signalements pour identifier et bloquer les numéros frauduleux.
- Le site cybermalveillance.gouv.fr a lui pour mission d'assister les victimes de cybermalveillance, y compris les escroqueries par démarchage téléphonique. Il fournit des informations sur les menaces numériques et les moyens de s'en protéger. Il propose également des ressources pour comprendre les cybermenaces et savoir comment réagir [accessible ici]
- La plateforme Info Escroqueries, composée de policiers et de gendarmes, est chargée d'informer, de conseiller et d'orienter les personnes victimes d'escroquerie [accessible via le numéro vert 0 805 805 817]